Hedgehog, une molécule impliquée dans le contrôle de la durée de vie

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Publié le 18 novembre 2020 Mis à jour le 16 janvier 2021
Date(s)

le 1 mars 2020

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L’utilisation de la drosophile comme système biologique modèle a permis aux chercheurs de l’Institut de Biologie Valrose de démontrer que la molécule Hedgehog, connue pour son rôle ʺorganisateur de tissusʺ pendant le développement embryonnaire, est réutilisée au cours de la vie adulte pour protéger les cellules gliales et indirectement l’intégrité neuronale, permettant d’augmenter la durée de vie de l’animal. Ces travaux sont publiés dans la revue Cell Reports.

Chez l'homme, le vieillissement a été associé à divers défauts qui aboutissent à une perte de cellules irremplaçables, y compris des neurones et des cellules gliales de soutien dans le cerveau, entraînant une altération des réseaux synaptiques neuronaux et des fonctions cognitives. Les mécanismes moléculaires impliqués dans le maintien de l'intégrité du cerveau adulte sont encore mal compris. L’utilisation de la drosophile comme système biologique modèle a permis aux chercheurs de l’Institut de Biologie Valrose de démontrer que la molécule Hedgehog, connue pour son rôle ʺorganisateur de tissusʺ pendant le développement embryonnaire, est réutilisée au cours de la vie adulte pour protéger les cellules gliales et indirectement l’intégrité neuronale, permettant d’augmenter la durée de vie de l’animal. Ces travaux sont publiés dans la revue Cell Reports.

L'augmentation drastique de l'espérance de vie dans le monde a accru la proportion de la population âgée et a abouti à une recrudescence spectaculaire des maladies liées à l'âge. Sur la mortalité totale annuelle, on estime que dans les pays industrialisés, plus de 90% des décès sont dus à des causes liées à l'âge. Le vieillissement est le principal facteur de risque d'augmentation de la prévalence de nombreuses maladies neurodégénératives, dont la maladie d’Alzheimer, qui devrait toucher une population totale de 10 millions de personnes dans le monde. Par conséquent, toute avancée concernant les mécanismes moléculaires impliqués dans le vieillissement permettra de développer de nouvelles thérapies pour atténuer les maladies associées à l'âge.

Au niveau cellulaire, le vieillissement a été associé à divers dysfonctionnements qui aboutissent à une perte de cellules irremplaçables, y compris des neurones et des cellules gliales de soutien dans le cerveau, entraînant une altération des réseaux synaptiques neuronaux et de la fonction cognitive. Il existe de nombreux mécanismes impliqués dans le vieillissement cellulaire (réparation de l’ADN, homéostasie des mitochondries, stress oxydatif etc..), cependant, nos connaissances concernant les principales molécules circulantes impliquées dans le maintien de l'intégrité du cerveau adulte restent limitées.

L’équipe de Pascal Thérond (Institut de Biologie Valrose iBV, Université Côte d’Azur, CNRS, Inserm à Nice) étudie depuis de nombreuses années le mécanisme d’action de la molécule Hedgehog (Hh), une molécule très conservée chez les vertébrés, et a montré son rôle ʺorganisateur de tissusʺ au cours du développement embryonnaire. Andrew Rallis, chercheur dans l’équipe, a commencé cette étude en se demandant si cette molécule pourrait avoir également un rôle pendant la vie adulte. Pour cela, il a utilisé la drosophile comme système modèle, qui est un paradigme précieux pour les études sur l'extension de la durée de vie, en raison de sa vie relativement courte, de sa facilité de manipulation génétique et de sa conservation moléculaire avec les mammifères. L'objectif global du projet était d'acquérir une compréhension approfondie de la façon dont Hh est en mesure de promouvoir une longévité en bonne santé et de maintenir l’homéostasie du cerveau adulte pendant le vieillissement. Pour cela, les chercheurs ont manipulé génétiquement l’animal de manière à supprimer l’activité Hh (mutant Hh contrôlé) à partir seulement des premiers jours de la vie adulte pour s’affranchir de tout problème développemental. Dans ce cadre, Ils ont pu montrer une forte diminution de la longévité de l’animal, associée à une perte de l’intégrité des neurones dopaminergiques et de l’activité locomotrice. Plus impressionnant, les auteurs ont également montré qu’une simple élévation du niveau de la protéine Hh uniquement pendant la vie adulte permettait l’augmentation de la mobilité et de la durée de vie de l’animal. La protéine Hh agit au niveau des tissus mais elle est également circulante dans le sang de l’animal. Les auteurs ont montré que l’activité Hh dans le cerveau adulte stimule les cellules gliales, et que leur simple activation dans un animal mutant pour Hh permet la restauration des neurones dopaminergiques, de la mobilité et de la longévité du mutant. Les auteurs ont cherché à comprendre au niveau moléculaire le mécanisme d’action de Hh dans le cerveau et plus particulièrement au niveau des cellules gliales, fortement impliquées dans l’intégrité neuronale.

En collaboration avec des chercheurs de l’Université de Regensburg, ils ont réussi à montrer qu’en réponse à Hh, les cellules gliales expriment des molécules appelées chaperonnes. Ces protéines sont connues pour agir en coopération pour empêcher à la fois le mauvais repliement des protéines nouvellement synthétisées et l'agrégation des protéines lors d'un stress cellulaire. De manière remarquable, l’expression de deux de ces protéines chaperonnes (Hsp40 et Hsp68) dans la glie des mouches mutantes Hh, exerce un puissant effet neuro-protecteur, avec sauvetage des défauts neuronaux, de la locomotion et de la longévité de l’animal. Pour confirmer ces résultats, l’équipe a utilisé un modèle moléculaire mimant la maladie d’Alzheimer dans la drosophile, modèle dans lequel des agrégats protéiques sont observés dans les cellules du cerveau. Ces agrégats sont également responsables d’une mobilité et d’une longévité restreintes chez la mouche. Les auteurs ont pu montrer que l’activation des cellules gliales par Hh corrige partiellement la locomotion et la longévité dans ce modèle de maladie d’Alzheimer. Dans l'ensemble, ces études suggèrent que la communication gliale-neuronale dans le cerveau adulte est contrôlée par Hh ce qui garantit une neuro-protection soutenue par des facteurs protecteurs de la glie.

Cette nouvelle fonction de Hh comme acteur de la régulation de la durée de vie est certainement conservée chez les mammifères. En effet, tous les acteurs moléculaires décrits dans cette étude sont conservés ; en particulier l'homologue vertébré Hh de la drosophile, Sonic Hedgehog (Shh), est également présent dans le cerveau de souris et les cellules gliales murines répondent à ce signal. Étant donné qu’il a été montré préalablement que Shh a un rôle protecteur contre diverses neurotoxines in vitro , cette nouvelle étude suggère que l’activation de la glie par Hh peut améliorer les maladies neurodégénératives causées par l'agrégation de protéines aberrantes qui s’accumulent avec l’âge et prolonger la longévité et la forme physique.

Contact : Pascal Therond - Institut de Biologie Valrose (iBV)
0489150755
Pascal.THEROND@univ-cotedazur.fr
http://ibv.unice.fr/research-team/therond/