Interview d'alumni #9 : Laetitia Pierazzi, diplômée d'Université Côte d'Azur, CEO et Présidente de Mycélium Technologies

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Publié le 4 mars 2024 Mis à jour le 20 mars 2024
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le 4 mars 2024

Laetitia Pierazzi
Laetitia Pierazzi

Laetitia Pierazzi est CEO et Présidente de Mycélium Technologies et diplômée d'un Master management et conseil en systèmes d'information. Découvrez son parcours et ses aspirations !

Viser toujours la lune pour retomber dans les étoiles.

Pouvez-vous vous présenter et nous expliquer votre parcours universitaire ? 

A Université Côte d'Azur, j’ai commencé par des études en Mathématiques Appliquées puis je me suis tournée vers les sciences économiques en Master. J’ai obtenu notamment un master en Management et Conseil en Systèmes d'information en 2006 avant de continuer sur un doctorat à Paris. 
J’étais prise en prépa HEC, mais je me cherchais encore, je voulais faire de longues études dans mes matières de prédilection, et j’ai privilégié l’université. J’y ai trouvé un enseignement de haute qualité dans des matières qui me passionnaient et assouvissaient ma soif de connaissance et mon envie de performer. 

C’était à la fois une période un peu stressante parce qu’on nous demande étudiant de faire des choix importants qui vont déterminer notre trajectoire professionnelle, on se pose beaucoup de questions sur notre avenir, sur ce qu’on souhaite réellement faire, dans quel domaine on souhaite se réaliser. 
En parallèle, le fait d’entreprendre m’attirait déjà énormément très jeune, je débordais toujours d’idées que je n’osais pas encore concrétiser, ni partager. Je trouvais aussi à l’époque que le monde de l’université était « trop » déconnecté du monde de l’entreprise. Je voyais des étudiants d’école de commerce qui faisaient des stages, de l’alternance, étaient accompagnés, bénéficiaient d’un réseau d’Alumni.  A l’époque à l’université ça pêchait un peu à ce niveau-là, et j’aurais aimé bénéficier du même accompagnement et soutien. J’avais aussi à l’époque des appréhensions de faire le mauvais choix, comme si tout allait être ensuite figé, alors qu’avec du recul, rien n’est jamais figé. Il est possible de rebondir, changer de voie tout au long de sa carrière, c’est d’ailleurs ce que j’ai fait dans mes études avec un double cursus mathématiques/sciences économiques, puis professionnellement. C’est ta personnalité qui est déterminante, tu es toujours libre, et tout ce que tu as appris et capitalisé comme connaissance te servira toujours. 

Mes études à l’université sont aussi pour moi une période emplie de très bons souvenirs et d’émotion positive. J’adorais être étudiante, énormément de professeurs m’ont captivée et partagé leur passion ! J’ai énormément apprécié l’université car j’ai toujours eu conscience de recevoir un enseignement de très grande qualité. 

Cela m’a appris une méthode de travail, une capacité d’analyse et de rédaction, à résoudre des problèmes, une adaptabilité, à capter des connaissances et à capitaliser dessus. J’y ai aussi gagné en confiance grâce à une réelle bienveillance et un soutien des professeurs qui croyaient vraiment en moi. 
 

Quel est votre parcours professionnel ?  

J’ai commencé ma vie professionnelle en tant que Professeure d’économie pendant quelques années, j’ai adoré enseigner, et j’avais un super contact avec mes élèves. Je sortais d’ailleurs souvent des programmes pour leur parler d’innovation, ou des séances par groupe où chacun partait sur un projet d’entreprise, présentait un Business plan simplifié, etc ! Ils adoraient… Il faudrait le généraliser car beaucoup se découvrent la fibre entrepreneuriale ! Je voulais moi-même entreprendre depuis mon plus jeune âge, mais étant fille et petite-fille de professeurs, et excellente étudiante, mon entourage était très réfractaire à cette idée, trop risqué, et encore plus pour une femme ! J’ai mis quelques années avant de passer le cap et balayer ces idées préconçues suite à un évènement marquant et difficile dans ma vie. Je me suis dit c’est ce que tu as toujours voulu faire, alors fais-le ! Aujourd’hui, j’ai réalisé ce rêve avec deux entreprises à mon actif. 

J’ai crée ma première société dans l’import-export dans le domaine du sport bien-être où j’ai beaucoup travaillé sur le design et l’innovation produit. Je m’occupais de toute la chaîne logistique, du sourcing, contrôle qualité, au fret, à l’advertising, et suivi clients. Je travaillais essentiellement sur des marketplaces et plus particulièrement Amazon dont je suis devenue spécialiste FBA. 

J’avais réalisé mon premier rêve de créer ma société qui a performé mais j’étais encore sur ma faim. Il me manquait l’impact, donner du sens à ma passion. J’avais besoin d’entreprendre dans des domaines qui me touchent, et qui ont un impact positif collectif. C’est ce que je fais aujourd’hui avec Mycélium Technologies.  
 

Quelle est votre activité aujourd’hui ? 

MYCTECHS a conçu une solution innovante qui optimise la culture et la croissance du mycélium, ces filaments blancs qui sont aux prémices du développement des champignons. Nous sommes une startup à impact qui valorisons une économie circulaire en donnant une seconde vie aux résidus et co-produits de l’agro-industrie pour produire notre mycélium. Dans la nature, le mycélium est la partie « non visible » et souterraine des champignons. Nous sommes plus familiers avec la partie « visible » ou sporophore qu’on a l’habitude de manger (pied et chapeau du champignon). Mais le mycélium lui-même est un aliment complet aux multiples vertus santé et nutritionnelles, et délicieux à manger ! 
Je suis porteuse du projet et la représente au niveau national et international.  

J’apporte une vision stratégique sur le développement de l’entreprise, je participe aux appels à projets, aux labélisations, aux concours...aux recherches de financements, aux échanges avec nos prospects, je supervise les travaux de recherche et l’équipe.  Je dois savoir où nous en sommes, avoir en tête l’objectif, créer la cadence, gérer le planning du projet, l’organisation interne, le suivi financier et les moyens... 

Aujourd’hui, nous sommes six personnes dont mon co-fondateur et associé, Olivier Hiezely avec lequel je travaille de concert sur les décisions importantes. 
Dès le début, nous nous sommes approchés du pôle Recherche et Avenir qui connecte l’entrepreneuriat avec la recherche publique pour favoriser l’innovation. Cela nous a permis d’identifier, au niveau de la région, des spécialistes qui nous ont rejoint dès le début de l’aventure MYCTECHS. 
La startup est en plein développement. Au début comme dans toutes startups, nous sommes peu, donc nous avons plusieurs casquettes, gérons plusieurs domaines de compétences, puis l’équipe s’étoffe avec des experts dans leur domaine ! 
 

Vous pouvez nous en dire plus sur votre start-up et ce qui la différencie ? 

Notre innovation permet de produire du mycélium de façon industrielle, automatisée et en continue. Elle est la seule technologie spécifiquement pensée, conçue et adaptée à la culture du mycélium, c’est ce qui nous différencie. Notre expertise repose également sur les choix stratégiques des souches de champignons et substrats (la nourriture du mycélium sur lequel il va se développer), choisis en fonction de la croissance mycélienne, des qualités nutritionnelles et organoleptiques. 

Notre volonté est de décarboner notre alimentation. Produire du mycélium le permet en réduisant de -94% le besoin en eau,  -97% le besoin en terre et -97% les émissions carbone comparativement à la production de protéines animales. Nos process de production ont été pensés pour être les plus économes en énergie. Nous revalorisons par ailleurs des co-produits et résidus solides et liquides de l’agro-industrie que l’on appelle « substrats » qui sinon seraient détruits, et sur lequel le mycélium va se développer. 
Grâce à notre technologie et expertise, notre ambition et de proposer aux grands groupes de la nutrition et santé et de l’agroalimentaire différents produits à base de mycélium. En premier lieu, nos filets ou pavés mycéliens, en tant qu’alternatives savoureuses aux viandes à base de mycélium de champignons, car nous avons la capacité d’obtenir du mycélium pur, désolidarisé de son substrat. Également de la poudre enrichie en mycélium à réincorporer à des préparations nutritionnelles adaptées pour des publics spécifiques (personnes âgées, immunodéprimées, sportifs…), des alternatives laitières à base de mycélium, et des extraits comme molécules d’intérêt. 
 

Vous pouvez nous en dire plus sur le mycélium et comment est venue l’idée ? 

J’ai grandi toute ma vie dans un environnement scientifique grâce à mon père qui a fait toute sa carrière dans un des plus grands laboratoires pharmaceutiques mondial. C’est lui qui m’a insufflé cette passion pour les champignons et le mycélium. Beaucoup de recherches portent sur le traitement de pathologies lourdes grâce aux champignons, et mettent en exergue leurs vertus nutritionnelles et thérapeutiques. 

Le mycélium est un aliment complet qui contient tous les acides aminés essentiels pour une alimentation équilibrée. C’est la protéine la plus rapide à cultiver (1 à 2 semaines en moyenne), très riche en fer, fibres, minéraux, vitamines, antioxydants, très pauvre en graisse et sucre, avec zéro impact négatif sur notre planète. Nous n’en avons pas forcément conscience, mais notre alimentation est une des principales causes du réchauffement climatique, et cela est en grande partie dû aux conséquences de l’élevage intensif. Nous nous devons de diversifier les sources de protéines, et de diminuer notre consommation excessive de viande, qui au-delà des conséquences très négatives sur notre planète a également des conséquences sur notre santé.  

Le mycélium est par ailleurs délicieux à manger de par sa saveur « umami », une saveur très appétente et appréciée à la dégustation, caractéristique des viandes, des champignons, des fromages… Et son petit plus, il a une texturisation naturelle qui rappelle le plaisir ressenti lors que l’on mange des viandes et des filets, et cela sans aucune transformation, ni ajout néfaste pour notre santé. 
Nous souhaitons travailler très rapidement avec des chefs de cuisine pour sublimer notre produit en cuisine et le faire connaître au plus grand nombre en tant que nouvel aliment. Nous travaillons d’ailleurs sur ces sujets avec l’IMREDD (Université Nice Côte d’azur). 

Vous avez un message pour les étudiants et diplômés ? 

Oui ! Ne jamais se décourager… Foncez ! Osez !  
Et tout particulièrement pour les femmes qui peuvent avoir plus de réticences et de manque de confiance à se lancer dans l’entreprenariat, et encore plus dans la Deeptech, et à se lancer dans des parcours ambitieux. Si je peux aider en leur disant qu’il ne faut pas se censurer et faire exploser le plafond de verre, j’en serais très heureuse !   
 

Pourquoi êtes-vous devenue ambassadrice du réseau alumni ?  

J’ai été lauréate récemment du concours de pitch de la Satt sud-est au Château de Valrose à Nice (My innovation Is). J’ai eu une grande émotion de retrouver mon université et ce campus, de retourner aux sources… 
J’étais honorée que l’on me demande si je voulais devenir ambassadrice, c’est une reconnaissance de mon parcours. Accepter d’être ambassadrice, c’est aussi dire merci à l’université pour m’avoir permis d’en arriver là, à mes professeurs de m’avoir toujours encouragée au plus haut niveau. C'est du don contre don. Si je peux aider, contribuer, inspirer, j’en suis vraiment ravie et enthousiaste.  
 

Vous avez une devise ? 

Viser toujours la lune pour retomber dans les étoiles. J’ai une très forte personnalité, je ne lâche rien, et avec du travail, de la persévérance et de l’ambition, on a de très forts atouts pour réussir tous ses rêves, et dans tous les cas on apprend toujours pour mieux rebondir ensuite !  

osons ensemble
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