Dialogues autour du cimetière de Saint-Dalmas de Tende
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le 10 juin 2025
Prieuré de Saint-Dalmas de Tende
Mardi 10 juin 2025, au Prieuré de Saint-Dalmas de Tende, une rencontre a été organisée par les chercheuses Agnès Jeanjean et Karine Emsellem de l’Université Côte d’Azur, en collaboration avec l’association « Remontons la Roya », pour échanger avec les habitants sur les résultats de leurs recherches autour du cimetière du hameau, lourdement affecté par la tempête Alex.
Le cimetière en 2018 (Source : Géoportail, Photographie Aérienne, 2018)
Le cimetière lors de l’évènement de la tempête Alex en 2020 (Source : Nice-Matin, 2020)
Ce drame soulève de nombreuses questions à portée universelle : enjeux de mémoire individuelle et collective, problématiques historiques, géographiques et climatiques, déplacements de population, mais aussi interrogations anthropologiques sur la manière dont une communauté réagit à la disparition brutale de ses repères funéraires.
Karine Emsellem, géographe à l’Unité mixte de recherche ESPACE, a retracé l’histoire de Saint-Dalmas de Tende, un hameau marqué par des déplacements de frontière entre la France et l’Italie. Elle a rappelé que le village s’est structuré au cours de la seconde moitié du XXe siècle autour d’une communauté d’immigrés italiens. Lors de la discussion qui a suivi, les habitants ont témoigné de l’importance du cimetière, fondé officiellement en 1958, comme lieu fondateur de l’identité personnelle et collective.
Un extrait du documentaire réalisé par Marylou Cler a ensuite été projeté. On y voit la cérémonie de commémoration des 4 ans d’Alex, la bénédiction du cimetière le jour de la Toussaint, suivies de témoignages de deux habitantes guidant la caméra à travers la partie restée intacte du cimetière. Elles déambulent aussi dans la partie altérée, en tentant d’y reconstituer les anciens emplacements. Elles y évoquent les défunts, partagent des souvenirs d’enfance et les liens familiaux. Elles confient également leur sentiment d’abandon, l’impression d’une légitimité jamais acquise en raison de leurs origines italiennes et renforcée par la disparition physique de leurs morts.
Enfin, Agnès Jeanjean, anthropologue au laboratoire LAPCOS, a animé une discussion sur les réponses symboliques apportées par les habitants à cette perte. Comment une communauté peut-elle continuer à exister lorsqu’elle ne peut plus accomplir les rites qui relient passé, présent et avenir, qui permettent un dialogue entre les vivants et les morts ? Les cénotaphes reconstruits à partir des pierres - trouvées ci et là, dans le cimetière ou ailleurs -, sont devenus le support de nouveaux gestes rituels. Ils permettent aux habitants de renouer avec les rites funéraires e de réaffirmer leur humanité : des gestes simples mais essentiels pour reconstruire un lien social, une mémoire et une continuité collective.
Ce travail de recherche est soutenu par des financements de l’Académie 5 « Homme, idées, milieux » et de la Maison de sciences de l’homme et de la société Sud-Est. Pour plus d’information voir la page du projet de recherche.
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