Étirage de bulles dans une fibre en silice

Ce projet mobilise des physiciens et des experts reconnus dans le domaine des matériaux pour étudier une nouvelle génération de fibre optique. L’objectif de ce travail de recherche est de développer de nouvelles fibres optiques en silice qui pourraient être utilisées dans différents domaines tels que l'éclairage ou l'imagerie médicale.


Développer de nouvelles fibres optiques de silice

La fibre optique est un fil de verre très fin entouré d'une gaine réfléchissante qui a la propriété de conduire la lumière. Les fibres en verre sont presque toujours fabriquées à partir de la silice. La silice est un composé oxygéné du silicium présent dans un grand nombre de minéraux, tels que le quartz, la calcédoine et l’opale.

Associée généralement aux télécommunications et à internet à très haut débit, la fibre optique se déploie également dans de très nombreux autres domaines d’applications. Tel que les lasers (découpe, télédétection laser) ou les capteurs (contraintes dans un ouvrage d’art, température, niveau de remplissage d’un réservoir, etc.).

Pour mettre au point des fibres optiques deux étapes sont nécessaires. Tout d’abord, il faut fabriquer une préforme, c’est un barreau de verre de silice qui est à l’image de la fibre optique que l’on souhaite obtenir mais dont les dimensions sont beaucoup plus grandes. La seconde étape consiste à étirer cette préforme, à l’aide d’un four, pour obtenir une fibre optique.

L’objectif de ce projet est de développer de nouvelles fibres optiques en silice qui pourraient être utilisées dans différents domaines tels que l'éclairage ou l'imagerie médicale.

Pour atteindre cet objectif, des équipes de chercheurs de l’Institut de Physique de Nice et du Centre de mise en forme des matériaux (CEMEF) se penchent sur l’étude d’une nouvelle génération de fibres en silice constituées des bulles ou des canaux d’air.


Entre simulations et expérimentations

Les fibres actuelles sont conçues avec un cœur solide en silice où passe la lumière. Une nouvelle génération de fibre optique fait son arrivée sur le marché. C’est une fibre composée d’un cœur creux dans lequel des bulles ou des canaux d’air sont incorporés.

A travers ce projet, les chercheurs étudient, pour la première fois, les déformations des bulles d'air lors du processus d'étirage de ces nouvelles fibres optiques en silice.

Pour étudier ce matériau, 3 étapes sont planifiées.

La première étape consiste à effectuer des simulations numériques à l’aide de la librairie CIMLIB développée au CEMEF. L’objectif est de comprendre comment les bulles d’air se déforment et provoquent leur fractionnement pour se multiplier à l’intérieur de la fibre. Ce volet sur la simulation sera effectué en augmentant graduellement le niveau de difficulté.

Pour mieux comprendre comment les bulles d'air se déforment, diverses simulations sont prévues en vue de les soumettre à des différentes instabilités capillaires provoquant leur fractionnement en multiples bulles. Il sera par exemple question d’assujettir les bulles d’air à des instabilités d’ordre thermiques sur ordinateur.

Ensuite, pour valider les données théoriques obtenues suite aux simulations, des expériences en laboratoire sont prévues sur des préformes contenant des bulles d'air. Les préformes (barreau de verre de silice indispensable pour fabriquer la fibre) seront fournies par Saint-Gobain Recherche (Aubervilliers) et dans le cadre d'une collaboration avec le COMSET (Université de Clemson, USA).

Le but de ces expériences est d’étirer des préformes à l’Institut de Physique de Nice (INPHYNI) suivant différents diamètres (2 mm à 125 µm) à différentes températures (entre 1750 et 2000 °C) dans le but de faire varier la viscosité de la silice sur un ordre de grandeur.

Enfin, la dernière phase du projet consiste à étudier par microscopie électronique des échantillons de préformes et de fibres au CCMA. Des essais préliminaires se sont déjà déroulés permettant de valider un protocole de préparation. Il s’agira dans ce volet d'observer l'allongement de bulles de quelques µm de diamètre sur plusieurs centimètres.

Pour y parvenir, de nouveaux outils de simulations numériques des déformations des bulles d’air vont être développés. Les résultats seront comparés avec des mesures expérimentales, notamment par microscopie électronique.

Des études récentes ont montré l'intérêt applicatif de fibres contenant des canaux d'air. De telles fibres permettent un guidage de la lumière de manière optimale. L’absence de friction de la lumière avec la matière réduit son affaiblissement ainsi que la nécessité de ré amplifier le signal.


Un impact fort dans la communauté « matériau »

Ce projet réunit pour la première fois des équipes de différents laboratoires ayant une expertise reconnue dans le domaine des matériaux et en particulier du verre et de ses propriétés mécaniques.

Plus précisément, il s’agit de deux équipes du laboratoire de Physique de Nice (INPHYNI), à savoir : « Fibres Optiques et Applications » (tour d'étirage en fibre optique, polissage des échantillons) et équipe « Rhéologie des Suspensions Concentrées » (rhéologie, écoulement du verre). Puis deux équipes du CEMEF, à savoir : « Rhéologie, Microstructure, Procédés » (transfert thermique, milieux diphasiques, science du verre) et équipe « Computing and Fluids » (simulations numériques).

Il s'agit donc d'un projet séminal pour fédérer et structurer la recherche dans ce domaine au niveau d’Université Côte d’Azur. En effet, les études menées dans le présent projet mêlant simulations numériques et résultats expérimentaux devraient avoir un impact fort dans la communauté « matériau », en particulier auprès des chercheurs s’intéressant aux propriétés mécaniques du verre. Par cet aspect complémentaire il devrait donc fédérer et structurer à long terme la recherche dans ce domaine au sein d’Université Côte d’Azur.

Enfin, les résultats obtenus, suites aux simulations effectuées sur l'étirage d'un verre contenant des bulles d'air auront des retombées dans le domaine des fibres optiques appelées « Anderson » et « diffusantes».

 

L'Académie Systèmes Complexes soutient ce projet d'études des déformations des bulles d'air lors du processus d'étirage d'une fibre optique en raison de la combinaison de développements en simulations numériques avec des études expérimentales comparatives dans le cadre d'objectifs et d'applications clairement définis, et au regard de la pertinence du consortium proposé (CEMEF, INPHYNI, CCM). Le financement de la subvention s'élève à 10k€  pour couvrir des dépenses pour des missions et des équipements.