Interaction entre les cellules et les nanofils pour la réalisation d’une plateforme optogénétique

Ce projet rassemble des physiciens, des biologistes et des microscopistes afin d’étudier l’impact des nanofils sur l’activité de nos cellules neuronales. Ces fils de matière nanoscopiques sont des super émetteurs de lumière. L'objectif in fine du projet est d’élaborer de nouveaux supports lumineux en vue de mener des expériences d'optogénétique dans le but de mieux comprendre le fonctionnement des réseaux neuronaux.


Les nanofils : de minuscules objets aux grandes potentialités

Les nanofils sont des fils de matière infiniment petits qui bouleversent notre environnement technologique. Ces nano matériaux semi-conducteurs font déjà partie de notre vie quotidienne. Des puces d’ordinateurs sont, par exemple, fabriquées à partir de ces derniers.

En raison de leur taille nanométrique, des effets appelés de confinement quantique se produisent. Autrement dit, leur taille modifie considérablement la manière dont l'électricité, la chaleur ou encore la lumière sont transportées dans le nanofil.

De multiples applications sont attendues dans des domaines aussi variés que l'énergie, ou l'électronique ultra-rapide. Pour les laboratoires d’Université Côte d’Azur l’utilisation des nanofils est envisagée pour le diagnostic médical et l'éclairage.

Etant donné que les nanofils peuvent être utilisés comme de super émetteurs de lumière, ils présentent une source d’intérêt pour des physiciens en Science des matériaux du CRHEA, des biologistes de l’ IPMC, et des microscopistes du CCMA.


Mettre en lumière le comportement individuel des neurones

L'excitabilité est au cœur de nombreuses fonctions physiologiques. Elle est particulièrement évidente dans le système nerveux où tous les échanges neuronaux sont basés sur la propagation d'un signal électrique à travers des circuits neuronaux.

L'organisation des circuits neuronaux est déterminante dans le traitement de l'information. Le schéma d'excitabilité général dépend de l'excitabilité de chaque neurone du réseau. Cependant, les mécanismes de l'excitabilité de chaque neurone restent encore mal compris. L'une des raisons principales est la difficulté à étudier le comportement des neurones de façon individuelle dans un réseau.

Pour mieux comprendre les processus cellulaires, il est essentiel que les chercheurs se dotent de supports afin de pouvoir modifier, avec précision, l'activité de cellules spécifiques à des moments précis.

Ce contrôle précis est désormais possible en combinant l'optique et la génétique, soit en faisant appel à l'optogénétique. Dans ce contexte, l’idée des chercheurs est de se baser sur l'expression de protéines dans les cellules dont l'activité est sensible à la lumière dans l’objectif d’entraîner des changements dans l'activité de la cellule. Plus précisément, il sera question de déclencher une activation ou au contraire une inhibition de l’activité cellulaire.

Aussi pour être en capacité d’étudier le fonctionnement de l’activité neuronal à partir de cellules individuelles, l’équipe du présent projet vise à mettre au point une plateforme de photostimulation. Cet outil performant combinerait sondage multisite, haute résolution spatiale et manipulation facile pour des expériences in vitro et in vivo.

Cependant, une condition préalable à la réalisation d'un tel dispositif est de s’assurer de la biocompatibilité suffisante entre les nanofils et les cellules en contact.


Elaborer un matériau innovant pour des études biologiques

L’objectif de ce projet interdisciplinaire est de fabriquer un nouveau type de dispositif d'illumination pour mener des expériences optogénétiques en vue d’étudier l’activité des circuits neuronaux. A long terme, l’objectif final vise à réaliser un implant pour être en capacité de procéder à des analyses rapides et non invasives.

Pour mener à bien ce projet, la participation de trois laboratoires d’Université Côte d’Azur dont l'expertise est reconnue sera mobilisée :

Le Centre de Recherche sur l'Hétéro-épitaxie et ses Applications (CRHEA),
L’Institut de Pharmacologie Moléculaire et Cellulaire (IPMC),
Et le Centre Commun de Microscopie Appliquée (CCMA).

Leur travail de recherche s’articule en trois temps.

Dans un premier temps, il s’agit de réaliser, au CRHEA, des surfaces de nanofils en Nitrure de Gallium (GaN) sur lesquelles seront déposées des cellules.

Dans un second temps, la culture et la caractérisation des cellules seront effectuées à l'IPMC. Cette étape consiste à évaluer la biocompatibilité de la surface par différentes techniques de microscopie et d’imagerie.

Les chercheurs prévoient d’observer le changement de comportement des cellules sur ces surfaces avec des nanofils de différentes tailles et densités, et d’étudier la manière dont les propriétés des cellules se modifient et la nature du contact avec les surfaces.

Enfin, la dernière phase de travail prévoit d’effectuer, au CCMA, l’analyse microscopique des cellules sur les nanofils. Le but de cette étude est de contrôler finement l'interface entre les cellules et les nanofils. Les résultats obtenus auront un impact sur la fonctionnalité du dispositif.

La mission finale de toutes ces étapes de travail est d’obtenir une biocompatibilité satisfaisante entre le matériau et cellules. Ce point est crucial étant donné que plusieurs études précédentes montrent que le comportement des cellules dépend fortement des types de nanofils et de cellules.

L’originalité du projet réside dans le choix du matériau utilisé comme source lumineuse, à savoir les nanofils semiconducteurs en Nitrure de Gallium (GaN). Ils n’ont jamais été employés pour des études biologiques jusqu’à ce jour.


Lutter contre les troubles neurologiques et psychiatriques

En neuroscience, l’optogénétique permet d’observer et de contrôler en temps réel l’activité de populations neuronales spécifiques. Cette avancée technique majeure offre la possibilité de pouvoir analyser des circuits neuronaux en mesurant par exemple leur activité électrique.

A ce jour, la plupart de troubles neuro-dégénératifs ne sont toujours pas traités faute d’avoir trouvé des thérapies spécifiques. Grâce à l’optogénétique, de nouvelles pistes thérapeutiques pour les troubles neurologiques ou psychiatriques pourraient ainsi être envisagées.


Entre partenariat académique et industriel

Le consortium très complémentaire du présent projet reposant sur une étroite collaboration entre physiciens en Science des matériaux (CRHEA), biologistes (IPMC) et microscopistes (CCMA) est adoubé d’un partenariat prometteur avec l’entreprise ALEDIA.

Cette start-up est pionnière dans les produits de nouvelle génération dans le domaine des LED ou light emitting diode, pour diode électroluminescente. Aussi, dans le cadre de ce projet les laboratoires CHREA et IMPC en collaboration avec la start-up, ALEDIA, cherchent à fabriquer des nanofils capables de remplacer les ampoules à LED actuelles.

Cette nouvelle génération d’ampoule serait environ quatre fois moins chère à fabriquer, d’une meilleure efficacité énergétique et émettrait une lumière plus intense.

Ces LED à base d'ensembles GaN NW font actuellement l'objet d'un fort développement industriel. Les avancées techniques réalisées dans le présent bénéficieraient d’un transfert industriel immédiat. Le CRHEA et la start-up ALEDIA ont déjà signé en 2012 et 2016 des accords de collaboration, facilitant ainsi le transfert de la propriété intellectuelle et de la technologie.

Enfin, les résultats des études menées à travers cette collaboration complémentaires fourniront des éléments nécessaires à la préparation de futurs projets de recherche nationaux et européens.

Ceci est d'autant plus intéressant que trois des quatre acteurs majeurs dans le domaine des LEDs à base de GaN NWs, ALEDIA, OSRAM Opto Semiconductors et Glo, sont situés en Europe.
 
L'Académie Systèmes Complexes soutient ce projet transdisciplinaire construit entre CRHEA, IPMC et CCMA doté d'un potentiel de développement à grande échelle, sur le plan scientifique mais aussi sur le plan de la valorisation pour lequel un partenariat prometteur existe déjà avec la startup ALEDIA. Ce projet possède aussi un fort potentiel d'attraction pour des étudiants intéressés par les approches entre la biologie, la physique et l'ingénierie. Le financement de l'Académie vise à couvrir des dépenses de fonctionnement (consommables, consommables biologiques, matériel informatique) avec une subvention allouée de 12k€.